Ita L. Née Goldfeld

Ita L. Née Goldfeld

« Ita l. née Goldfeld » : un monologue testimonial émouvant


Une heure pour faire ses bagages. Une heure pour se préparer et mettre son manteau à l’étoile jaune.

Ita a 67 ans. Elle vit à Paris, 30 rue du Petit Musc. Elle entend des pas dans l’escalier. Elle se remémore les bons et les mauvais souvenirs. Elle repense aux Martin, ses voisins, à son mari Salomon, aux fêtes, à leur dernière soirée avec les Martin, à Hanouka, au strudel dans la cuisine, au kneidler pour Pessah. Durant cette heure interminable, tout lui revient en mémoire et la peur entre aveuglément abîmant la vie et le rêve.

Elle se souvient aussi  d’une fable dans laquelle le rabbin enlève l’âme des enfants. Elle dresse des portraits de familles ashkénazes : Aaron, le frère de son mari qui joue du violon, son premier fils Jacques qui vient d’être déporté à Drancy, ses autres enfants, ses sœurs…


Dans ce monologue émouvant, Françoise Nahon nous fait partager avec beaucoup de justesse et de gravité l’intériorité angoissante d’une femme avant sa déportation. La peur et l’incertitude envahissent l’attente lourde, pesante et confuse.


« Une vieille juive sans sa famille n’est rien », affirme Ita. A qui  parle-t-elle ? A qui s’adresse t-elle durant ce voyage des souvenirs ? Bascule-t-elle vers le rêve ou le cauchemar qui fait revivre les fantômes ?


Ita cherche sa valise, la remplit  de souvenirs, d’objets, d’habits. La valise devient le refuge du souvenir des êtres disparus. « Un bon juif ne doit jamais être loin de sa valise ». Ita se tient prête. On va venir la chercher. L’heure est proche. Elle aussi prendra le train. Rejoindra-t-elle  son fils à Drancy ? Son regard est puissant, miroir de toute une vie et rempart à la folie.


On voudrait la prendre dans nos bras, lui dire de se calmer.


Cette pièce, ponctuée par de très belles musiques aux sonorités yiddish et magnifiquement interprétée par Françoise Nahon, montre l’angoisse de l’attente entre la vie et la mort. Parole testimoniale mise sur une scène, monologue tragique de l’inconnu,

cette pièce se transforme en témoignage artistique participant au devoir de mémoire.

  Gabrielle